Le Sphinx, Gardien d’un Passé Oublié

Dominant les sables d’Égypte, le plateau de Gizeh abrite des monuments fascinants, dont le Grand Sphinx, créature énigmatique mi-homme, mi-lion. Ce site, mêlant ingéniosité architecturale et structures rudimentaires, semble témoigner d’une superposition de civilisations à travers le temps. Contrairement à l’idée d’une évolution linéaire, certains pensent que les constructions les plus anciennes, notamment le Sphinx, sont paradoxalement les plus avancées.

Le Sphinx de Gizeh : Un Monument énigmatique

Mesurant environ 73 mètres de long et 20 mètres de haut, le Sphinx est sculpté dans le calcaire du plateau de Gizeh. Son érosion particulière, plus marquée sur le corps que sur la tête, suggère une ancienneté bien plus grande que celle admise par l’égyptologie conventionnelle.

Pourquoi l’égyptologie associe le Sphinx à Khéphren ?

L’hypothèse dominante attribue la construction du Sphinx à Khéphren, pharaon de la IVe dynastie (vers 2500 av. J.-C.). Cette théorie repose sur plusieurs éléments :

• Son intégration au complexe de Khéphren : Le Sphinx est proche de la pyramide de Khéphren, ce qui suggère un projet architectural commun.

• La ressemblance supposée avec Khéphren : Certains archéologues estiment que le visage du Sphinx ressemble aux statues connues du pharaon.

• L’orientation symbolique : Tourné vers l’est, il pourrait représenter le pharaon divinisé, lié au culte solaire de Rê-Horakhty.

• L’absence de mentions antérieures : Aucun texte égyptien plus ancien ne mentionne le Sphinx, suggérant qu’il n’existait pas avant la IVe dynastie.

Cependant, ces arguments restent déductifs et ne reposent pas sur des preuves directes, comme une inscription attribuant formellement le Sphinx à Khéphren.

Les limites de l’attribution à Khéphren

1. Absence de mention explicite : Aucun cartouche ou inscription de Khéphren ne relie directement le Sphinx à son règne, ce qui est inhabituel pour un monument d’une telle importance.

2. Érosion plus marquée que les monuments de Khéphren : Le temple du Sphinx montre une usure plus avancée que les structures contemporaines, suggérant une construction plus ancienne.

3. Différence morphologique : Des études faciales indiquent que les traits du Sphinx ne correspondent pas aux représentations de Khéphren.

4. Silence des textes de l’Ancien Empire : Aucune mention du Sphinx avant le Nouvel Empire (vers 1400 av. J.-C.), alors que les pyramides et temples de Gizeh sont abondamment référencés.

Ces éléments alimentent l’hypothèse selon laquelle le Sphinx aurait été hérité par les Égyptiens de l’Ancien Empire plutôt que construit par eux.

La thèse géologique de Robert Schoch : un bouleversement historique

Dans les années 1990, Robert Schoch, géologue, propose une datation plus ancienne du Sphinx en se basant sur l’érosion hydrique visible sur son corps et l’enceinte qui l’entoure.

Une érosion incompatible avec le climat actuel

Contrairement aux pyramides, érodées par le vent et le sable, le Sphinx présente des stries verticales et des contours adoucis typiques d’une érosion causée par des pluies abondantes. Or, l’Égypte est un désert depuis au moins 5000 ans. Les dernières précipitations significatives remontent à la fin du Néolithique, vers 7000-5000 av. J.-C., ce qui suggère que le Sphinx daterait d’une époque bien antérieure à l’Ancien Empire.

Implication d’une civilisation plus ancienne

Si le Sphinx date de 7000 av. J.-C. ou plus tôt, cela implique l’existence d’une civilisation avancée capable de sculpter un tel monument bien avant l’apparition des pharaons. Cette hypothèse remet en question la chronologie officielle de l’histoire égyptienne.

Tentatives de réfutation et débats scientifiques

Face à cette hypothèse, plusieurs objections ont été avancées :

• L’érosion pourrait être due à des remontées d’eau souterraine : Schoch réfute cette idée en expliquant que l’usure observée ne correspond pas à ce type de phénomène.

• L’humidité du Nil pourrait être en cause : Peu probable, car le Sphinx est situé bien au-dessus du niveau du fleuve.

• Le Sphinx aurait pu être sculpté dans une roche déjà érodée : Cette théorie est contredite par la continuité des stries verticales sur l’enceinte creusée en même temps que le monument.

Un mystère non résolu

L’érosion hydrique du Sphinx suggère une construction bien plus ancienne qu’admise, mais aucune preuve formelle ne permet de trancher définitivement. L’absence d’inscriptions, les incohérences stylistiques et les indices géologiques laissent la porte ouverte à des révisions profondes de notre compréhension de l’histoire égyptienne.

Le Sphinx de Gizeh reste un défi aux certitudes académiques, un gardien silencieux dont l’origine pourrait bien remonter à une époque oubliée, bien avant les pharaons.