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Regard moderne sur l'Egypte : dépasser Champollion

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    Maîtriser Ses Pensées
  • 26 mars
  • 3 min de lecture

L'égyptologie moderne est née dans un contexte bien particulier : celui des campagnes napoléoniennes de la fin du XVIIIe siècle. Loin d'être une science pure et neutre, elle est d'abord une entreprise intellectuelle, culturelle et politique, portée par des hommes fascinés par l'Égypte antique mais pris dans les logiques de conquête et de domination. Loin des outils scientifiques contemporains, les premiers pas de l'égyptologie relèvent davantage de l'interprétation littéraire, de la déduction intellectuelle et parfois du fantasme romantique. Aujourd'hui, avec les nouvelles technologies à notre disposition, il devient essentiel de repenser cette discipline et de réinterroger notre regard sur des monuments comme les pyramides ou le Sphinx, d'autant plus que des structures souterraines viennent d'être détectées sous la pyramide de Khafrê.


Les campagnes napoléoniennes : une redécouverte européenne de l'Égypte


En 1798, Napoléon Bonaparte lance une expédition militaire en Égypte, accompagnée d'un corps expéditionnaire scientifique sans précédent. Mathématiciens, artistes, cartographes et naturalistes sont rassemblés pour « étudier » le pays conquis. Cette entreprise donnera naissance à la monumentale Description de l’Égypte, vaste compilation de croquis, relevés et descriptions destinée à un public européen avide d’exotisme et de savoirs nouveaux.


Mais ce regard porté sur l'Égypte est biaisé dès l'origine. Les savants français la conçoivent comme une terre figée, hors du temps, détachée de son présent arabe et africain. L'Égypte antique est muséifiée, fétichisée, déconnectée de ses populations. Cette fascination se double d'une entreprise de contrôle symbolique : comprendre l'Égypte, c'est mieux la posséder.


Champollion et l'acte fondateur : déchiffrer pour dominer ?


L'autre figure majeure de cette époque est Jean-François Champollion, le "père" de l'égyptologie moderne. En 1822, grâce à la Pierre de Rosette, il parvient à déchiffrer les hiéroglyphes — un exploit intellectuel basé sur des intuitions géniales, une maîtrise du copte, et une logique comparative. C'est une victoire de l'esprit, de la lettre, de la linguistique.


Mais là encore, l'entreprise est très européenne. Champollion lit les hiéroglyphes pour les faire entrer dans les catégories occidentales du langage, de l'histoire et de la raison. Il invente une discipline à partir de documents dispersés dans les musées européens. Son regard, bien qu'admiratif, est celui d'un homme du XIXe siècle, traversé par les idées de progrès, de classement, de civilisation.


L'égyptologie, à ce stade, est encore une science d'érudits et de bibliothèques, nourrie d'observations esthétiques et d'hypothèses littéraires. Elle n'a pas encore les moyens d'accéder physiquement aux entrailles des monuments, ni de questionner les structures invisibles aux yeux.


Le tournant technologique : vers une nouvelle vision des monuments


Depuis le début du XXIe siècle, l'égyptologie a accédé à des outils scientifiques sans précédent : radar à pénétration de sol, imagerie 3D, drones, tomographie par muons. Ces technologies permettent de sonder les pyramides sans les détruire, de détecter des cavités, des couloirs, des structures enfouies.


La récente découverte de potentiels tunnels sous la pyramide de Khafrê en est un exemple saisissant. Ces passages, encore inexplorés, pourraient révéler de nouvelles fonctions funéraires, rituelles ou symboliques. Ils pourraient aussi remettre en cause des siècles de certitudes basées uniquement sur l'analyse de surface.


Mais pour que ces découvertes ouvrent vraiment une nouvelle ère, il faut se libérer des présupposés du passé. Les monuments égyptiens ne doivent plus être lus uniquement à travers le filtre littéraire des savants du XIXe siècle. Il faut les voir avec des yeux neufs, ouverts aux données physiques, à la complexité des savoirs locaux, aux approches plurielles.


Un regard critique à reconstruire


Le danger aujourd'hui serait de superposer aux anciennes interprétations littéraires de nouvelles thèses sensationnalistes, déconnectées de la rigueur scientifique. Entre les fantasmes extraterrestres, les civilisations perdues et les lectures new age, les pyramides continuent d'être l'objet de projections, comme si on refusait toujours de considérer leur véritable complexité historique.


Pourtant, nous avons les moyens de relancer une égyptologie critique, interdisciplinaire, ouverte aux outils technologiques, mais aussi aux voix égyptiennes, africaines, et aux traditions orales. Il ne s'agit pas de rejeter Champollion ou les savants napoléoniens, mais de contextualiser leur travail, de reconnaître ses limites et de continuer l'enquête avec les outils d'aujourd'hui.


Conclusion : De la lettre à la matière, repenser l'égyptologie


L'histoire de l'égyptologie est fascinante parce qu'elle est une aventure humaine, faite de découvertes, d'erreurs, de génie et de croyances. Mais elle est aussi marquée par des biais culturels, des détournements politiques, des oublis volontaires. Aujourd'hui, alors que la technologie nous permet de voir au-delà des apparences, il est temps de dépasser la lecture littéraire de l'Égypte antique pour entrer dans une véritable archéologie critique, scientifique, plurielle.


Les pyramides, le Sphinx, les temples et les hiéroglyphes n'ont pas encore livré tous leurs secrets. Mais pour les comprendre, encore faut-il changer de lunettes. Passer de Champollion à la tomographie, de la plume au capteur, c'est peut-être là que réside l'étape suivante de notre compréhension de cette civilisation immense.

 
 
 

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